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Comment ces Français préparent des supercars pour piloter sur glace

La société française Laponie Ice Driving s’installe chaque année sur un lac gelé, en Laponie suédoise, pour permettre à ses clients de piloter sur glace. Avec des Maserati mais aussi des Lamborghini et des Porsche spécialement modifiées.

Arjeplog, Laponie suédoise, -19°C. Sur un lac gelé à plus de 80 centimètres par endroit, une Maserati Ghibli glisse dans un sens, puis dans l’autre. Son conducteur n’est absolument pas en détresse ni même inquiet de s’être aventuré un peu trop loin du rivage. Bien au contraire. Comme cet autre conducteur, au volant d’une Porsche 911 GT3, il est venu s’initier aux joies du pilotage sur glace chez Lapland Ice Driving.

Faire glisser n'importe quelle voiture

Cette société française propose de début janvier à fin mars une expérience unique dans des modèles d’exception, sur des tracés de circuits de Formule 1 reproduits à l'échelle 1, comme le circuit français du Castellet ou celui anglais de Silverstone. "Je vais voir la Ghibli sous un autre angle!", s’enthousiasme Didier Gervais, propriétaire depuis un an et demi de la dernière berline Maserati.

Pendant 2 jours, cet industriel originaire de Cannes a enchaîné appel, contre-appel et mises en travers sur les douze circuits tracés sur la glace, au volant d’une Ghibli de série, mais en réalité bien différente de celle qu’il conduit sur les routes de Côte d’Azur.

"Aucune voiture n’est faite pour glisser, mais avec notre préparation, on peut ensuite arriver à faire glisser n’importe quelle voiture", résume Eric Gallardo, fondateur et directeur de Lapland Ice Driving.

Comme les 25 autres voitures de Lapland Ice Driving, cette Porsche 911 GT3 fait chaque jour l'objet d'un entretien minutieux.
Comme les 25 autres voitures de Lapland Ice Driving, cette Porsche 911 GT3 fait chaque jour l'objet d'un entretien minutieux. © Pauline Ducamp

Eric Gallardo et ses équipes ont ainsi développé un équipement spécial, à destination des 26 sportives que compte le garage Lapland Ice Driving.

"Cette préparation doit à la fois permettre à nos clients de prendre le maximum de plaisir, tout en autorisant les sorties de pistes en toute sécurité. Elle doit aussi permettre aux voitures d’affronter des températures pouvant aller jusqu’à -40°C confie Christophe Bentivoglio, associé d’Eric Gallardo, et instructeur pendant la saison. Les voitures doivent pouvoir être extraites de la neige, et repartir".

Toutes les voitures sont ainsi renforcées par un ski à l’avant attaché jusqu’aux longerons arrière. Toutes les pièces de plastique sous le bas de caisse sont elles remplacées par des pièces en métal. Si la voiture sort sur la neige tassée, les soubassements ne sont ainsi pas détériorés. Le ski protège également la grille de radiateur, et le radiateur, derrière la calandre.

Par grand froid, le plastique devient cassant quand les températures baissent trop. Même les pare-chocs ou d’autres éléments de carrosserie peuvent se déchirer comme du papier pré-découpé par -30°C. Eux aussi sont donc renforcés.

Des pneus cloutés

Autre élément indispensable: les pneus à clous. Ces pneumatiques spéciaux ne sont pas homologués pour la route, Lapland Ice Driving s’approvisionne auprès d’une marque finlandaise. Il faut environ compter un clou par cheval (de puissance), afin d'être sûr de tenir la sportive sur la glace, tout en atteignant des vitesses qui peuvent aisément dépasser les 150 km/h.

Plusieurs dizaines de pneus cloutés sont rangées dans le garage Lapland Ice Driving. Ils sont changés environ tous les 3 jours.
Plusieurs dizaines de pneus cloutés sont rangées dans le garage Lapland Ice Driving. Ils sont changés environ tous les 3 jours. © Diane Touré

Leur durée de vie comme celle des freins, et des différentiels est très courte. Les pneus sont changés tous les trois jours environ, comme les freins. "Nous réalisons régulièrement des vidanges, notamment des différentiels, des organes très sollicités par le patinage", poursuit Eric Gallardo. Lorsque les voitures arrivent au garage, pour la première fois, les mécaniciens changent ou renforcent toutes les pièces connues pour être une source de panne sur chaque modèle, comme par exemple certains connecteurs d’une 911 GT3. Les voitures disposent également d’une rampe lumineuse sur le toit, pour rouler dans la nuit polaire, et de radio pour communiquer.

"Il faut huit à dix jours pour mettre au point l’équipement d’une nouvelle voiture", explique Éric Gallardo. Une cinquantaine d’heures de travail est ensuite nécessaire pour répéter l’opération sur toutes. Le soir, après avoir roulé en moyenne entre 250 et 400 kilomètres, les voitures rentrent au garage pour une inspection complète, après un déneigeage.

Sur les 26 voitures, 12 seulement tournent chaque jour au maximum afin d’assurer le programme d’entretien des véhicules. Ce savoir-faire compte beaucoup dans le développement de Lapland Ice Driving. La société a signé un partenariat avec Maserati pour proposer des sessions de pilotage de plusieurs jours sur leur gamme de véhicules. Une offre que d'autres constructeurs aimeraient aussi utiliser pour leur clientèle.

Pauline Ducamp, avec Diane Touré