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Prix des carburants: la hausse "injustifiée" a-t-elle bien eu lieu?

Une hausse d'un peu plus de 4 centimes a été constaté par le comparateur de prix Essence&Co pour le Gasoil vendu chez Leclerc.

Une hausse d'un peu plus de 4 centimes a été constaté par le comparateur de prix Essence&Co pour le Gasoil vendu chez Leclerc. - PHILIPPE HUGUEN / AFP

Après l'attaque visant des installations pétrolières en Arabie saoudite le week-end dernier, les prix à la pompe devaient augmenter de 4 à 5 centimes "rapidement", avaient prévenu les professionnels du secteur en France. Une hausse "injustifiée" selon le ministre de l'Economie, mais qui a pourtant bien eu lieu cette semaine.

C'était la grande crainte de ce début de semaine. Après l'attaque ayant visé des sites pétroliers en Arabie saoudite, le cours du brut avait augmenté de 10% lundi. En France, les professionnels du secteur ont rapidement alerté que les prix à la pompe allaient en conséquence s'orienter à la hausse.

Une hausse de 4 à 5 centimes qui devait s'appliquer "dans les jours qui viennent", avait alors indiqué Francis Duseux, président de l'Union française des industries pétrolières (Ufip). Ce jeudi, le ministre de l'Economie a toutefois estimé que le retour rapide du cours du brut à un niveau normal, environ 64 dollars le baril de Brent, ne permettait pas de justifier une hausse des prix à la pompe.

"Nous vérifierons qu'effectivement il n'y ait pas de répercussion à la hausse qui serait injustifiée de la part des distributeurs ou des pétroliers", a-t-il insisté.

Qui a augmenté les prix?

D'après les données recueillies par l'application de comparaison des prix en station Essence&Co, on constate tout de même des hausses de prix, plus ou moins importantes selon les enseignes.

"La grande distribution a répercuté cette hausse quasi-immédiatement", résume Pierre Auclair, fondateur d'Essence&Co.

Entre le samedi 14 et le mercredi 18 septembre, le prix du Gasoil chez Leclerc a par exemple pris un peu plus de 4 centimes, conformément donc à la prévision de l'Ufip.

Au lendemain de cette annonce de l'Ufip, largement reprise dans les médias, Michel-Edouard Leclerc se voulait pourtant rassurant. Sur son blog, il écrivait:

"Oui, les prix à la pompe vont momentanément grimper. Les achats se font partout au prix du renouvellement des stocks (à la hausse comme à la baisse). Les centres E.Leclerc seront obligés de répercuter, même s'ils chercheront à en freiner la répercussion en diminuant leurs marges (très faible, 2 à 3 centimes !!!)."

Pourquoi cette hausse?

Si les prix s'orientaient à la baisse suite au retour à la normale du cours du brut et de la déclaration de Bruno Le Maire, cette hausse reste difficile à comprendre: les carburants dans les cuves ont été produits à partir d'un pétrole brut raffiné bien avant les attaques visant les sites pétroliers carburants et ne devraient donc pas subir de répercussions aussi rapides. 

L'occasion également de rappeler que la hausse du prix du pétrole ne se répercute pas intégralement sur le prix à la pompe, ce dernier étant composé également par le coût du raffinage et de la distribution, et bien sûr des taxes, qui représentent 60% du prix final et qui restent fixes.

"Si la hausse des prix du brut a été immédiatement répercutée sur les prix des produits finis à Rotterdam (+10% environ), ce n’est pas en raison d’une hausse des cours du brut (qui n'a pas eu le temps de quitter son lieu de production, donc), mais par anticipation d’un décalage entre offre et demande", explique L'Usine Nouvelle.

L'annonce de l'Ufip, qualifiée de "prophétie auto-réalisatrice" aurait aggravé le phénomène. "La menace d'une hausse des prix créant toujours la tentation d'anticiper son plein de carburant", poursuit l'article, et donc d'augmenter le prix en gonflant la demande.

Ce vendredi en tout cas, les prix des carburants continuaient leur repli entamé jeudi, nous a indiqué Essence&Co. Difficile toutefois de savoir si c'est davantage le retour à la normale du prix du brut ou le rappel à l'ordre de Bruno Le Maire aux distributeurs qui a joué le plus grand rôle. 

Alors qu'une pétition a été lancée cette semaine par l'UFC Que Choisir pour réduire le poids des taxes dans le prix des carburants, le ministre de l'Economie a rappelé que cela représentait une option bien trop coûteuse.

Julien Bonnet