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Les trottinettes électriques dangereuses bientôt interdites à la vente 

Les nouveaux engins de déplacement personnel posent de nombreuses questions en termes de sécurité routière et de l'espace public.

Les nouveaux engins de déplacement personnel posent de nombreuses questions en termes de sécurité routière et de l'espace public. - AFP

Face au boom de l'utilisation de la trottinette électrique, la Fédération des professionnels de la micro-mobilité attend beaucoup de la future norme encadrant la mise sur le marché des engins de déplacement personnel. De quoi éliminer les modèles dangereux.

Un simple accident de trottinette électrique qui aurait pu tourner (encore plus) mal. Cette semaine, le YouTubeur Carlito a témoigné sur les réseaux sociaux après une chute dont il est ressorti avec une double entorse cheville et genou, entraînant une immobilisation d'au moins quinze jours.

"Ma trottinette électrique s’est repliée sans aucune raison alors que je roulais genre à 20km/h et du coup je me suis éclaté sur la route. Et encore j’ai eu de la chance de pas avoir de fractures et qu’aucune voiture m’ait foncé dessus. Donc vraiment soyez très vigilants avec ces engins, je vous le conseille, car un accident est vite arrivé", a-t-il écrit en commentaire de sa photo postée sur Instagram.

S'il n'existe pas encore de statistiques sur ces accidents, le développement de l'offre de trottinettes électriques à l'achat ou à la location en libre-service entraînerait son lot de blessures plus ou moins graves. Le premier crash-test entre une voiture lancée à 50 km/h et une trottinette, organisé récemment par l'assureur MMA, visait justement à marquer les esprits et à sensibiliser sur une pratique qui peut être risquée.

Mettre fin aux "jouets" dangereux

La faute en particulier à une offre de produits pas forcément adaptés et parfois dangereux, comme nous l'explique Jocelyn Loumeto. Cet administrateur délégué de la Fédération des Professionnels de la Micro Mobilité (FP2M) a travaillé à l'élaboration d'une nouvelle norme qui doit doit définir un cadre pour toute machine motorisée de déplacement personnel et respecter les directives européennes en termes de sécurité. Un texte actuellement examiné au niveau européen et qui doit entrer en application cet été. 

"L'objectif de cette norme (NF EN 17128) est d'améliorer le niveau de sécurité des produits qui, pour certains, sont davantage comparables à des jouets, indique Jocelyn Loumeto. La norme va exiger par exemple une roue d'au moins 125 mm alors que sur certains modèles vendus actuellement elles peuvent être de seulement 100 mm."

En évoquant l'accident vécu par le Youtubeur Carlito, un premier constat ressort: il ne devait pas s'agir d'une trottinette en libre-service, ce que laissait entendre certains commentaires lus sur son post Instagram. Les trottinettes comme celles proposées par Lime et Bird semblent en effet avoir été modifiées pour ne pas se plier, la fonction n’étant pas nécessaire au vu de l’usage.

Pour le repliage, suivre le modèle des poussettes

L'occasion pour Jocelyn Loumeto de souligner l'intérêt de la norme, qui permettra notamment d'éviter qu'une pièce trop fragile soit la seule permettant d'éviter ce genre de mésaventure: 

"Pour le repliage, la norme a pris comme modèle les poussettes pour enfants. Depuis quelques années, le secteur de la puériculture travaille énormément sur ce point après plusieurs accidents. On a repris le même principe avec trois mouvements volontaires bien distinctifs pour éviter justement tout risque de repliage par inadvertance."

Ne pas rouler trop vite... pour bien freiner

Autre point important: la vitesse. En début d'année, un utilisateur de trottinette électrique avait été filmé roulant à plus de 80 km/h et sans protection particulière... sur l'A86. Un exemple extrême qui traduit toutefois la capacité de certains engins à atteindre des vitesses excessives.

La norme prévoit ainsi de fixer une vitesse maximale de 25 km/h, comme pour les vélos à assistance électrique qui ont un arrêt moteur à cette vitesse. Mais le bridage pourra aussi être fixé un cran en-dessous pour respecter la distance maximale de freinage. Point qui pose actuellement problème, comme l'avait montré une enquête récente du magazine Auto Plus. Sur des modèles de gyropodes sans guidon (également appelé "hoverboard") ou de gyroroue, la limite pourrait ainsi être fixée à 20 km/h voire 15 km/h.

"La norme prévoit aussi des éclairages avant et arrière obligatoires ainsi qu’un avertisseur sonore, qui sur les gyroroues pourrait prendre la forme d’une bague munie d’un bouton et relié en Bluetooth ou Wifi à l’engin", ajoute Jocelyn Loumeto.

L'évolution du Code de la Route également attendue

Si la norme encadrera donc la commercialisation des engins de déplacement personnel (ou EDP), Jocelyn Loumeto compte aussi sur la loi d'orientation des mobilités (LOM), adoptée par le Sénat et qui sera prochainement examinée à l'Assemblée nationale. 

"Il faut bien distinguer la norme et la future loi LOM, qui va encadrer l’utilisation des engins de déplacement personnel dans l’espace public, en adaptant le code de la route. C’est la loi qui va par exemple interdire la conduite sur les trottoirs ou sanctionner le fait de circuler à deux sur une trottinette, des pratiques que l’on constate régulièrement et qui sont prohibées par les fabricants."

La loi permettra notamment aux forces de l'ordre de verbaliser certaines infractions, afin de faire cesser ces pratiques dangereuses. Côté sécurité, la fédération des professionnels de la micro-mobilité se positionne toutefois contre le port du casque obligatoire:

"A la FP2M nous pensons que cela serait vu comme une contrainte forte par les usagers et freinerait le développement de l’usage de la trottinette: dès qu’on devient un utilisateur régulier, en particulier si on a vécu une première chute ou une belle frayeur, on s’équipe en général naturellement d’un casque et de gants." 

Pour Jocelyn Loumeto, les assureurs ont aussi un rôle à jouer. Ils devraient inciter les utilisateurs à s'équiper pour limiter les risques de blessures en cas d'accident. A la différence du vélo, comme il s’agit d’engins motorisés, la souscription d’une assurance corporelle est en effet obligatoire pour utiliser une trottinette électrique. 

Julien Bonnet