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Les Français boudent le contrôle technique

560.000 voitures ne sont pas en effet venues passer le contrôle technique en 2019

560.000 voitures ne sont pas en effet venues passer le contrôle technique en 2019 - MYCHELE DANIAU / AFP

560.000 voitures n’ont pas passé le contrôle technique cette année. En cause, le succès de la prime à la conversion, mais aussi la peur d’un contrôle plus sévère, selon les professionnels qui s’alarment de cette situation.

Surchargés l’an dernier, les centres de contrôle technique semblent bien déserts en cette fin d’année. Ce dont s’alarment les professionnels. 560.000 voitures ne sont pas en effet venues passer le contrôle technique en 2019. Les professionnels et notamment le Comité National des Professionnels Automobiles (CNPA) estiment même que d’ici fin décembre, 700.000 véhicules manqueront à l’appel. "C’est du jamais vu, nous n’avions jamais assisté à une telle situation", soulignait Karine Bonnet, présidente du réseau Dekra, dans le Journal de l’Automobile.

Le contrôle technique est pourtant obligatoire tous les deux ans pour tous les véhicules, à partir de la quatrième année d’immatriculation. Ces 560.000 voitures avaient bien été vérifiées en 2017, mais ne sont pas réapparues cette année dans les centres de contrôle technique. "Au mois d’août, notre activité a baissé de 15%, et en septembre, octobre, novembre, le nombre de visites étaient toujours en baisse de 7 à 8%", nous expliquait Laurent Palmier, PDG du réseau Sécuritest.

Des réformes découragent de passer au contrôle

Plusieurs causes peuvent expliquer ces chiffres hors norme. Une partie des voitures ont été détruites suite à l’achat d’un véhicule plus récent grâce à la prime à la casse, qui a connu un gros succès. Il existe par ailleurs toujours des retardataires qui "oublient" de passer le contrôle, ce qui amène une immobilisation de la carte grise et donc du véhicule (sauf pour se rendre au contrôle) et 135 euros d’amende en cas de contrôle par les forces de l’ordre. Mais ce sont surtout les deux réformes successives du contrôle technique, en mai 2018, puis en Juillet 2019, qui auraient découragé certains conducteurs de vieilles voitures de se présenter à l’échéance. 

La première réforme a introduit une nouvelle notion, la défaillance critique. Cette défaillance grave signale une dangerosité immédiate pour la sécurité routière comme l’absence de liquide de frein par exemple. Elle entraîne une immobilisation dans les 24 heures, et l’obligation de passer une contre-visite dans les deux mois, après avoir réparé. En juillet, le contrôle de la pollution des diesel a aussi été renforcé. 

Un contrôle automatique par les forces de l’ordre

"Les gens font de moins de moins d’entretien, car ils n’en ont pas forcément les moyens, constate Laurent Palmier. Et ils ne viennent ensuite pas passer le contrôle par crainte de découvrir qu’il y a un problème, que leur diesel par exemple ne passera pas, ce qui entraînera de lourdes factures. Or, seulement 4,5% des voitures sont recalées pour cause de pollution". 

Au-delà d’une baisse de chiffres d’affaires pour les réseaux, Laurent Palmier pose la question de la sécurité des propriétaires de ces voitures sans contrôle technique, comme des usagers de la route qui les croisent: "Les défaillances critiques représentent 1,5% des contre-visites, ce qui veut dire que 10.000 véhicules circulent alors qu’ils devraient avoir été immobilisés le soir même. On laisse rouler des gens dans ces voitures, ce n’est pas acceptable". 

Les professionnels ont alerté les pouvoirs publics, dont le délégué interministériel à la sécurité routière Emmanuel Barbe. Une lettre a également été envoyée au Premier ministre Edouard Philippe par le CNPA. Certains professionnels demandent ainsi que l’absence de contrôle technique puisse être contrôlée automatiquement par les forces de l’ordre, comme le défaut d’assurance, simplement via une lecture des plaques d’immatriculation. 

Pauline Ducamp
https://twitter.com/PaulineDucamp Pauline Ducamp Rédactrice en chef adjointe web