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Les automobilistes se font petit à petit à la circulation différenciée

Reconduite pour un 3e jour consécutif en Ile-de-France, la circulation différenciée est appliquée pour la première fois dans des villes comme Marseille. Avec un peu de flottement quant au système de vignettes Crit’Air.

Oscillant entre la surprise, la compréhension et la résignation, les automobilistes de la région parisienne, Lyon, Annecy, Strasbourg, Grenoble, et du centre de Marseille ont compos ce jeudi avec des mesures interdisant le trafic aux véhicules les plus anciens, en plein pic de canicule et de pollution.

De la souplesse à Marseille

A Marseille, les règles sont plus souples qu'ailleurs: seules les vignettes Crit'air 4 et 5 sont interdites. Et surtout, le préfet l'a annoncé: aucun PV ne sera dressé. Place Castellane, en plein centre, les policiers n'obligent même pas les automobilistes sans vignette - l'immense majorité - à faire demi-tour. Le département a depuis été classé en vigilance rouge à la canicule, de quoi peut-être inciter à ne pas se déplacer.

Sur le bitume où des files de voitures ronronnent sous un soleil de plomb jeudi, l'heure est à la pédagogie. 150 policiers sont déployés dans un secteur qui englobe notamment la gare Saint-Charles, la Cannebière, les plages du centre-ville ou les abords du stade Vélodrome.

Une prise de conscience?

"Bonjour, on fait de la prévention, mais la prochaine fois ce sera de la répression", explique un agent à Michel, plombier au volant de son vieil utilitaire diesel, rapporte l’AFP. Il n'a pas demandé de vignette et se voit remettre un prospectus sur la marche à suivre. "Je comprends la démarche, mais bon, on est bien obligés de travailler", juge l'artisan.

"C'est très bien pour Marseille, mais il faut aussi s'attaquer à la pollution des bateaux et des avions", note Christophe, un infirmier qui, ce jeudi, a choisi les transports en commun. Il parie que la mesure portera ses fruits: "On n'est pas plus bêtes qu'ailleurs".

Les Marseillais "sont très surpris, ils ont l'impression de tomber du placard", constate le capitaine de police Rémy Bissonnier, pour qui "le jour J environnemental à Marseille, c'est aujourd'hui". Dans une ville où les transports en commun accusent un net retard, cette mesure avait été réclamée à plusieurs reprises, notamment par les écologistes. Plusieurs responsables de gauche demandent d'y ajouter des mesures d'urgence sur les émanations des navires. Le port a réagi mercredi soir en limitant la vitesse sur l'eau.

"On a l'impression de toucher à la liberté de déplacement"

Ailleurs en France, la circulation différenciée entre peu à peu dans les moeurs. A Strasbourg, les contrôles se voulaient également pédagogiques, mais les véhicules qui n'ont pas la vignette Crit'Air 1, 2 ou 3 doivent faire demi-tour. "J'ai hésité à prendre mon vélo ce matin, je me suis fait avoir, je pensais qu'il n'y aurait pas de contrôle", reconnaît Aurore, l'une de ces automobilistes recalés, qui pense à "ceux qui ne peuvent pas faire autrement". "On a l'impression de toucher à la liberté de déplacement", note Françoise Bey, vice-présidente socialiste de l'Eurométropole, en charge de la qualité de l'air, pour qui "la pédagogie est importante".

Signe d'une "prise de conscience collective, "au total 1.200 vignettes Crit'Air ont été achetées dans le Bas-Rhin et 500 en Allemagne, depuis l'annonce de la circulation différenciée", selon Dominique Schuffenecker, directeur de cabinet du préfet.

Accompagner les gens

A Lyon aussi, outre les véhicules de classe 4 et 5, les véhicules munis de vignettes Crit'air de classe 3 n'étaient pas autorisés à rouler jeudi, pour la première fois dans la capitale des Gaules: au total, ce sont près de 170.000 véhicules qui étaient théoriquement immobilisés, soit 56% du parc automobile total de la ville, selon AAA Data, fournisseur de données automobiles.

"On essaie d'accompagner les gens vers le changement, en faisant de la pédagogie", a rappelé jeudi la préfète déléguée à la défense et à la sécurité Emmanuelle Dubée: "Je comprends que ce soit difficile pour certains, mais c'est le prix de l'effort pour tous".

Pauline Ducamp, avec AFP