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"Je suis parti en vacances en voiture électrique"

Le Model X prêt à partir de chez le loueur Blooweels à La Défense

Le Model X prêt à partir de chez le loueur Blooweels à La Défense - JB

Alors que la France devait avoir amorcé d'ici à 2040 sa mutation vers des véhicules "propres", avec donc un parc qui ne sera plus uniquement diesel ou essence, nous avons tenté l'expérience d'un voyage longue distance entre Paris et Val d'Isère. Notre véhicule: un Tesla Model X, pionnier des SUV 100% électrique et capable de transporter 7 passagers. Retour sur ce qui sera peut-être bientôt une pratique courante lors des départs en vacances des Français.

Mon vaisseau pour ce e-voyage

Pour un long trajet de départ en vacances, j'ai choisi un véhicule adapté: un Tesla Model X 90D (90 pour sa batterie de 90 kWh et D pour "Dual Motor", un moteur à l'avant et un à l'arrière). Ce SUV lancé en 2015 par la marque américaine ne passe pas inaperçu avec son aspect (très) volumineux, d'autant plus avec ce blanc immaculé, et bien sûr ses célèbres portes Falcon. A l'arrêt et pour accéder aux places arrières, elles se déploient telles les ailes d'un oiseau.

Le Tesla Model X se reconnait (entre autres) à ses portes Falcon, qui s'ouvrent comme 2 ailes d'oiseau.
Le Tesla Model X se reconnait (entre autres) à ses portes Falcon, qui s'ouvrent comme 2 ailes d'oiseau. © JB

C'est auprès du loueur spécialisé dans les véhicules électriques et hybrides, Blooweels, que je suis allé récupérer mon véhicule. Rendez-vous mercredi 12 juillet dans l'après-midi pour prendre en main le gros SUV dans son parc de La Défense. Arrivé à mon domicile au sud de Paris, me voici prêt pour le départ programmé pour le lendemain matin, après avoir chargé la voiture pour les vacances (par "charger" j'entends remplir ce qu'il reste du coffre de mon SUV en configuration 7 places).

Le coffre de mon SUV, pourtant en version 7 places, me permet tout de même de loger les deux cartons de livres Tesla L'ampère contre-attaque.
Le coffre de mon SUV, pourtant en version 7 places, me permet tout de même de loger les deux cartons de livres Tesla L'ampère contre-attaque. © JB

Jeudi 13 juillet à 9h, en route!

Jeudi 13 juillet à 9 heures, c'est parti, je prends la route! Je dispose d'une autonomie annoncée de 302 km avec le Model X. En arrivant à bord, je rentre ma destination finale, Val d'Isère, dans le GPS sur l'agréable écran de 17 pouces qui trône au milieu du tableau de bord (au passage, cette partie du véhicule reste identique à celle qu'on retrouve dans la berline Model S).

Après un petit temps de calcul, l'ordinateur m'indique pour chaque arrêt mes étapes de recharge, avec l'autonomie estimée à chaque passage et le temps prévu pour que la batterie reprenne des forces. Je n'ai donc pas besoin d'écumer les sites qui recensent toutes les bornes de recharge en France, et de calculer mes étapes. Le Model X le fait à ma place.

Sont ainsi programmés des passages par les stations superchargeurs d'Auxerre (10h30), de Mâcon (13h40) et de Grenoble (15h50). Ces stations de recharge rapide réservées aux utilisateurs Tesla sont un des atouts majeurs de la marque dans la bataille commerciale avec les autres constructeurs de véhicules électriques. Avec une puissance pouvant dépasser les 100 kW, ces bornes permettent de récupérer (plus) rapidement de quoi reprendre la route.

Au début de mon parcours, l'ordinateur me donne les différentes étapes "recharge" de mon parcours. Je suis parti pour 9h44 de route, Google Maps me donne au plus court et sans arrêt un trajet en 6h56.
Au début de mon parcours, l'ordinateur me donne les différentes étapes "recharge" de mon parcours. Je suis parti pour 9h44 de route, Google Maps me donne au plus court et sans arrêt un trajet en 6h56. © JB
Le Model X branché sur un des superchargeurs de la station d'Auxerre
Le Model X branché sur un des superchargeurs de la station d'Auxerre © JB

Premier "e-plein" dès 10h30

Mon premier "plein" d'électricité est donc programmé à Auxerre. Je ne m'arrête pas dans une station-service, comme j'en ai l'habitude avec ma voiture essence. Pour patienter sans devoir rester dans le véhicule ou zoner autour, les superchargeurs Tesla sont généralement installés à côté de restaurants ou d'hôtels. 

Pour mon premier stop à Auxerre, j'ai ainsi pu m'installer dans l'hôtel Mercure voisin pour prendre un café et consulter mes mails. De quoi patienter sans voir le temps passer. A noter qu'il s'agit toutefois d'une zone où il n'y a pas beaucoup de choix "d'activités". En cas de stop de nuit, on peut donc dormir au Mercure (ou au Formule 1 pour les Teslistes fauchés), dîner à l'hôtel (de préférence au Mercure vu qu'il n'y a qu'un distributeur au Formule 1) ou au Courtepaille. Vu le temps à consacrer à mes pauses-recharge, je suis à deux doigts de me lancer dans l'écriture d'un guide des meilleurs restaurants et hôtels à proximités des bornes de recharge.

Sur ce premier arrêt à Auxerre, la puissance grimpe rapidement à 110 kW, ce qui me permet de récupérer l'équivalent de 451 km d'autonomie par heure (une vitesse qui décroît au fur et à mesure du remplissage de la batterie). Bon, j'ai tout de même passer 50 minutes au Mercure en attendant... Note pour plus tard: prévoir des occupations pendant les e-pleins.

La vitesse de recharge atteint ici les 451 km récupérés par heure
La vitesse de recharge atteint ici les 451 km récupérés par heure © JB

Quel rythme adopter?

Précision importante pour ceux qui s'inquiètent des arrêts rapprochés pour recharger le véhicule. Je voyage seul et plutôt léger (un sac de voyage, un sac à dos et mon chargement de 12 livres... sur Tesla, oui forcément). Théoriquement, cela améliore mon autonomie par rapport à une famille avec 2 parents et 2 ou 3 enfants ainsi que leurs bagages.

Pour compenser, j'adopte un rythme plutôt rapide, en roulant aux limites de vitesse imposées, ce qui réduit le temps entre les étapes mais fait baisser mon autonomie plus rapidement. Comme un véhicule électrique récupère de l'énergie lors des phases de décélération, ces trajets longue distance et à vitesse élevée sont relativement éprouvant pour la batterie. Il est ainsi recommandé de rouler 10km/h en-dessous de la limite, 120km/h par exemple sur autoroute, pour optimiser le ratio temps de conduite/temps d'arrêt. Avec une batterie qui se vide moins vite, le temps d'arrêt aux superchargeurs sera logiquement moins long, ce qui reste avantageux en comparaison avec le temps perdu à rouler moins vite.

Le menu du restaurant aux superchargeurs de Mâcon... prometteur mais il était déjà trop tard!
Le menu du restaurant aux superchargeurs de Mâcon... prometteur mais il était déjà trop tard! © JB

Deuxième stop Mâcon 13h40: "c'est possible de déjeuner?"

Après être parti d'Auxerre avec 350 kilomètres disponibles annoncés, je poursuis mon parcours autoroutier vers ma deuxième étape, aux superchargeurs de Mâcon. La station a récemment été considérablement agrandie: les deux bornes ont été remplacées par un mini-parking réservée aux Tesla, avec un total de 10 stèles. Au-delà de l'arrivé prochaine de la Model 3, la marque américaine anticipe aussi les nombreux passages d'utilisateurs européens, se rendant sur leur lieu de vacances en France par exemple. 

A cette station de Mâcon, le choix est encore plus limité qu'à Auxerre car on ne trouve qu'un hôtel-restaurant à proximité. En alternative à cette optique consumériste, on peut aussi s'offrir une petite balade à pied sur les bords de Saône. Mais, n'ayant rien avalé depuis le petit-déjeuner, il est tant de s'accorder un pause déj. Il est 13h40 lorsque j'arrive à l'accueil du restaurant et que je demande s'il est possible de déjeuner. On me répond que le service est terminé. Les touristes étrangers apprécieront de découvrir qu'en France on mange encore beaucoup à heure (très) fixe. Et cela vaut aussi en pleine saison, une veille de 14 juillet...

Bref, je me contente d'un café accompagné de mes petits gâteaux achetés en prévision la veille. Un investissement judicieux vu qu'il n'y a même pas l'ombre d'un spéculos pour se joindre à ma boisson chaude redynamisante. Me voilà reparti avec une batterie quasi-pleine (341 kilomètres d'autonomie) à 14h30. "Toutes les 2 heures, la pause s'impose" est un adage que le Model X me force à adopter.

Le Model X aux superchargeurs de Mâcon
Le Model X aux superchargeurs de Mâcon © JB

Ne pas rester trop longtemps aux superchargeurs

Car oui, la nourriture spirituelle apportée sur mon téléphone via la 4G m'a fait un peu déborder du temps prévu. En temps normal, un client Tesla reçoit d'ailleurs une notification et peut consulter en temps réel son niveau de charge via une application (ce que j'avais pu tester lors d'un précédent essai).

Dans mon cas, et comme je suis passé par l'agence de location Blooweels, je n'ai pas pu établir la connexion. Un chrono lancé sur ma montre me permet toutefois de ne pas risquer une facturation qui s'applique depuis début 2017 pour ceux qui laisseraient un peu trop stationné leur véhicule sur ces bornes qui ne sont pas un parking (vous avez déjà vu quelqu'un se garer devant une pompe de station service ?) 

L'Autopilot, véritable allié sur la route

Depuis mon entrée sur le réseau autoroutier, je profite pleinement de l'assistant de conduite plutôt poussé de Tesla: le célèbre Autopilot. Sur un long trajet monotone, il permet d'adopter un poste de "surveillant de l'état du trafic" plutôt que celui de réel conducteur. En complément du régulateur de vitesse adaptatif, le véhicule suit les lignes de la route et peut changer de file en actionnant le clignotant.

En cas d'arrêt complet dans un bouchon, il reste actif ce qui permet de se dispenser d'un va-et-vient répétitif entre le frein et l'accélérateur. Dans cette situation, j'ai parfois repris l'initiative. Mon Model X - et ses 2,27 mètres de large - avait tendance à se placer exactement au centre de sa voie, ce qui peut gêner les motards qui remontent les files. 

L'occasion justement d'évoquer ce point important: Tesla, avec son système Autopilot, ne propose qu'une conduite SEMI-autonome (une version poussée du niveau 2 d'autonomie pour les connaisseurs). Cela implique que le conducteur doit toujours garder les mains sur le volant et être prêt à réagir en cas de problème. C'est ainsi que dans cette période de transition qui semble nous conduire vers des "voitures-robots", ce type d'assistant doit être manipulé avec précaution.

Il faut le tester pour se rendre compte mais pour ma part, je trouve ce copilote numérique d'une redoutable efficacité (seuls les premium allemands comme Mercedes ou BMW semblent être actuellement à la hauteur). Sur une conduite sur autoroute, l'attention se porte sur une zone plus étendue que d'ordinaire ce qui demande moins de concentration. Une fatigue différente et que j'ai de mon côté trouvé moins "usante" qu'en conduite traditionnelle. Autopilot + pauses toutes les 2 heures grand maximum, je ne devrais pas arriver éreinté sur mon lieu de villégiature.

Privé de son assistant, une conduite plus éprouvante

Mais c'était sans compter une privation d'Autopilot! C'est en effet en l'absence de son assistant que l'on en ressent le manque. Non, je n'ai pas lâché trop longtemps mes mains du volant (depuis 2016, l'Autopilot peut en effet être désactivé provisoirement en cas de mauvais usage par l'utilisateur)... j'ai juste été victime de l'incroyable capacité d'accélération de mon Model X!

Si c'est du déjà vu et revu sur le terrain 0 à 100 km/h, les Tesla en ont encore dans le ventre au-delà. Pour faire simple lorsque vous rouler avec l'Autopilot enclenché (et donc le régulateur), un mouvement du volant ou un appui sur le frein vous fera reprendre le contrôle (désactivation de l'Autopilot), mais pas si vous appuyez sur l'accélérateur. Résultat, avec ce mode de conduite assisté, vous pouvez monter jusqu'à 150 km/h, soit la limite du régulateur de vitesse.

Sauf qu'encore au-delà, l'Autopilot envoie un message d'erreur et indique qu'il s'est désactivé. Sur ma version, cela entraînait également la fameuse punition, à savoir l'impossibilité de réactiver l'assistant jusqu'au prochain arrêt en mode parking. De quoi rendre le trajet Mâcon-Chambéry, un peu plus éprouvant... le ventre un peu vide il faut dire (l'effet petits gâteaux à ses limites).

Le Crit'air ultime, réservé aux électriques et hybrides rechargeables
Le Crit'air ultime, réservé aux électriques et hybrides rechargeables © JB

16h30, 3e stop à Chambéry: mon Model X et moi, nous avons faim!

16h30, soit 2 heures après mon départ de Mâcon, la pause s'impose pour mon Model X et moi! Au début de mon parcours, l'ordinateur m'a redirigé du superchargeur initialement prévu de Grenoble vers celui de Chambéry. Je branche mon Model X, à côté d'une Model S-taxi voisine. Avec 73 km d'autonomie, l'ordinateur de bord me donne 40 minutes de recharge avant de pouvoir repartir.

A disposition, un Spa ou un restaurant. La clim du Model X fonctionne bien et le "jeûne de Mâcon" me pousse à tenter ma chance à La Maison Rouge, à deux pas de mon Model X. Bonne pioche, on accepte de me préparer de quoi tenir la route jusqu'à ma destination finale: vive la planche savoyarde charcuterie-fromage de 16h30! De retour à mon Model X, lui aussi repus, me voilà reparti. Juste le temps de faire joujou avec les portes Falcon pour attirer une famille en train d'admirer une sublime Ferrari garée non loin. Une stratégie qui a fait ses preuves: en deux-trois battements d'ailes, j'ai en effet réussi à détourner l'attention des enfants du cheval cabré vers mon gros faucon électrique.

Un moyen de transports pour les vacances au XXe siècle, en rouge. Les vacances du XXIe en blanc.
Un moyen de transports pour les vacances au XXe siècle, en rouge. Les vacances du XXIe en blanc. © JB

19h40, arrivée à Val d'Isère

Après quelques tribulations du GPS de la Tesla (pas son point fort selon de nombreux propriétaires) qui voulait absolument me faire passer par le centre-ville bouché d'Albertville, me voilà arrivé à destination: la station de Val d'Isère. Il est 19h40, soit presqu'une heure de plus que prévu au départ. J'ai un peu traîné aux superchargeurs et fait deux ou trois arrêts pour prendre des photos, donc ce retard reste raisonnable.

J'arrive sur place avec un peu plus de 20% de la batterie, soit 75 kilomètres disponibles. Heureusement en plein Salon du Véhicule électrique et hybride de Val d’Isère , je suis en terrain "électric-friendly", avec de quoi se recharger. Pour un long trajet de 750 kilomètres, le confort des sièges et le comportement général du véhicule et de sa motorisation silencieuse m'ont clairement permis de ménager mes forces. Une fois mon Model X branché, je suis prêt à profiter des premiers feux d'artifice d'avant 14 juillet. "Allons enfants de la patrie électrique!"

Bilan comptable du trajet: 849,70 euros
Electricité: 0 euro
Péages: 52,10 euros
Café, "planche goûter" et boisson: 15,60 euros
Coût de la location: 782 euros (530 euros de location (forfait 300 km) et 252 euros pour le pack + 400km).

Prix (minimum) du Tesla Model X 90D: cette version n'est plus commercialisée, il faut donc se rabattre sur un Model X 100D (batterie de 100 kWh), environ 120.000 euros (en configuration 7 sièges et avec pack premium). Avec une batterie plus petite, le Model X 75D (avec une configuration équivalente) démarre à 101.350 euros

Le Model X prêt à participer au rallye eMotion Tour, avec des Tesla Model S et un Roadster.
Le Model X prêt à participer au rallye eMotion Tour, avec des Tesla Model S et un Roadster. © JB
De notre envoyé spécial Julien Bonnet, de Paris à Val d'Isère