BFM Business
Auto

Faut-il rendre obligatoire le port du casque aussi bien à vélo qu'en voiture?

Le casque au volant pourrait dissuader des conducteurs de prendre le volant... mais pas forcément d'améliorer la sécurité.

Le casque au volant pourrait dissuader des conducteurs de prendre le volant... mais pas forcément d'améliorer la sécurité. - Top Gear / BBC

A New York, le sujet est sur la table. En France, la question est plutôt de savoir si le port du casque au volant de sa voiture est autorisé. Une telle mesure protégerait-elle vraiment davantage les automobilistes en cas d'accident?

C'est un débat qui revient régulièrement: faut-il rendre obligatoire le port du casque à vélo? Avec de nombreux nouveaux adeptes ces dernières années et l'arrivée de nouveaux engins comme les trottinettes électriques, la question s'est de nouveau posée l'an dernier. Des amendements à la Loi d’Orientation des mobilités (Lom) avaient été déposés, proposant de le rendre obligatoire pour tous, ou seulement pour les engins de déplacement personnel (EDP) motorisés.

Un casque à vélo obligatoire seulement pour les enfants

Si de nombreux cyclistes et autres "EDPistes" portent bien des casques, les associations de promotion du vélo restent souvent opposés à l'obligation de le porter. Deux raisons à retenir principalement: cela dissuaderait de se mettre à des formes de mobilité actives et cela compliquerait le fonctionnement des engins en libre-service et des Vélib'. Actuellement, ces services sont accessibles sans casque. 

Finalement, la ministre des Transports avait tranché, indiquant que le casque ne sera pas rendu obligatoire, pour le moment, restant uniquement imposé pour les enfants de moins de 12 ans (mais seulement depuis une loi entrée en vigueur en 2017).

Un casque dissuasif aussi pour les automobilistes?

La question de rendre obligatoire le casque à vélo se pose également à l'étranger. Aux Etats-Unis notamment, où récemment le débat s'est d'une certaine manière retourné contre les automobilistes.

Fin janvier, le gouverneur de l'Etat de New York, Andrew Cuomo, tenait une conférence de presse et a évoqué les problèmes de circulation de la ville de New York. S'il proposait la mise en place d'un péage urbain pour limiter le trafic automobile, un journaliste lui a suggéré de tout simplement rendre obligatoire le casque en voiture, rapporte Forbes.

Sous-entendu: si cela dissuaderait les cyclistes de pédaler, le même effet serait produit sur des automobilistes. Ils rechigneraient alors à prendre le volant à la moindre occasion et donc à créer des bouchons. La proposition n'a pas été rejetée par le gouverneur, qui a simplement demandé s'il existait des chiffres attestant que cela permettrait, en bonus, de réduire les blessures en cas d'accident de la route.

Le porte du casque autorisé en voiture...

Le casque obligatoire en voiture, une future idée pour améliorer les chiffres de la sécurité routière? Mais, tout d'abord, est-ce légal de ce côté de l'Atlantique, en France?

"Il n'est pas interdit de porter un casque en voiture donc c'est autorisé", nous a assuré un porte-parole de la sécurité routière, un peu surpris par notre question.

Il faut toutefois rester prudent. 

"Tout conducteur doit se tenir constamment en état et en position d'exécuter commodément et sans délai toutes les manoeuvres qui lui incombent", note l'article R412-6 du Code de la route qui pourra être invoqué si un agent juge que le casque gêne la visibilité ou la liberté de mouvement de la tête par exemple.

En dehors des casques conçus pour la conduite sur circuit ou les écoles de pilotage, difficile en revanche de trouver un casque pour la conduite "du quotidien" sur routes ouvertes. Le journaliste de Forbes en a tout de même trouvé un: un modèle produit par un fabricant australien entre 1985 et 1987 et qui ne s'est vendu qu'à 500 exemplaires.

Un casque pour automobiliste a été commercialisé entre 1985 et 1987.
Un casque pour automobiliste a été commercialisé entre 1985 et 1987. © copenhagenize.com

"En Australie, environ 70% des décès en voiture sont liés à une blessure à la tête", peut-on lire sur l'emballage du casque

...mais pas forcément conseillé

Mais à l'époque de sa commercialisation, nous étions dans les années 80 et la situation a évolué depuis comme nous l'explique Stéphane Buffat, directeur du LAB, le laboratoire d'accidentologie, de biomécanique et du comportement humain.

"Au cours des années 90 et 2000, on a diminué de moitié les lésions graves à la tête causée lors d'un accident grâce aux progrès de la sécurité embarquée, notamment grâce aux airbags frontaux et latéraux", rappelle-t-il. 

Une étude de 2018 de l'institut Vias, la sécurité routière belge, place ainsi la tête en troisième position parmi les parties du corps les plus fréquemment touchées chez les blessés lors d'accidents de la route, après le thorax et les membres inférieurs.

Dans ce contexte d'un habitacle conçu pour limiter au maximum les blessures au niveau du crâne, porter un casque pourrait même s'avérer contre-productif, souligne Stéphane Buffat:

"Il faut rappeler ce qu'apporte assez simplement un casque: une protection contre un objet qui pourrait causer une perforation et un effet d'amortissement avec la mousse qui permet de limiter le risque de lésions internes. Or, si cela s'avère une protection vitale pour les véhicules sans habitacle comme une moto ou un vélo, un casque peut ajouter entre 250 grammes et 1,2 kilo de poids à la tête, ce qui pourrait nuire au fonctionnement de l'airbag."

Autre problème posé par un casque en voiture, la difficulté pour les secours d'accéder à la tête et donc aux voies respiratoires suite à un accident, ajoute notre expert en accidentologie.

Si on voit justement régulièrement des pilotes de course porter un casque c'est justement car l'airbag n'est pas présent, tout comme de nombreux équipements de sécurité, dans les voitures homologuées pour la course, afin de gagner du poids. Sur circuit, même à bord de voitures également homologuées pour la route, le casque reste obligatoire car on sort du cadre d'une conduite normale, avec donc un risque plus élevé d'accident à haute vitesse. Les équipements de sécurité perdent alors en efficacité.

Julien Bonnet