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Comment le trafic s’évapore quand une route est fermée à la circulation

Les chercheurs constatent qu'une partie du trafic disparaît quand une route ferme.

Les chercheurs constatent qu'une partie du trafic disparaît quand une route ferme. - Flickr - David McKelvey - CC

Quand une route est fermée à la circulation, une partie de la circulation s’évapore. C’est ce qu’anticipe la Mairie de Paris avec la fermeture à la circulation des voies sur berge rive droite. Retour sur ce phénomène bien connu des chercheurs.

Que deviennent les 43.000 véhicules qui empruntaient chaque jour les voies sur berge rive droite? C’est l’évolution qu’étudie depuis près de 10 jours la Mairie de Paris, et que scrutent aussi bien les maires de la petite couronne, que la présidente de la région Valérie Pécresse et la préfecture de police.

"Quand la capacité de trafic est réduite, on constate que 10% (à court terme) à 20% (à long terme) du trafic, en moyenne, s’évapore", explique Frédéric Héran, économiste et urbaniste, chercheur à l’université de Lille 1.

Cinq comportements face à une route fermée

L'évaporation est un concept étudié depuis de nombreuses années. Quand une route est fermée, les gens qui empruntaient cet axe ont en moyenne cinq comportements. Une partie se reportent sur d'autres axes, une autre sur d'autres moyens de transport. D'autres renoncent à certains déplacements ou troquent leur déplacement habituel par un déplacement plus court, par exemple en faisant leurs courses dans un magasin plus proche.

A plus long terme, certains trajets ne se feront plus du tout, car les conducteurs auront déménagé à côté de leur lieu de travail. Ce sont toutes ces disparitions de trajets qui sont regroupées sous le terme "évaporation". "Or, les modèles échouent très régulièrement à prédire le trafic car ils ne prennent pas en compte des comportements comme le renoncement à certains déplacements", précise Frédéric Héran.

Un mois en moyenne pour que changent les comportements

Pour le chercheur, comme dans d'autres cas, la suppression de la circulation sur les voies sur berge rive gauche à Paris en 2013 ou le tunnel de la Croix-Rousse à Lyon par exemple, les automobilistes vont donc s'adapter. Et plus vite qu’imaginé. Il faut environ 1 mois pour que les premiers comportements varient et au bout d'un an en général, les habitudes de trajet ont été modifiées. Comme lors de la fermeture du Pont Mathilde à Rouen en 2008: 92.000 véhicules l’empruntaient chaque jour, soit la moitié du trafic parisien. 10% du trafic s’est au final évaporé.

Une tendance de fond

Frédéric Héran n'a pas travaillé avec la Ville de Paris sur le projet de piètonisation des voies sur berge rive droite. En mettant en perspective les différents projets similaires et l'histoire de la circulation à Paris depuis les années 60, il se montre optimiste.

"De 1948 à la fin des années 60, le trafic routier a été multiplié par 6 dans Paris. Les municipalités successives n’ont eu depuis de cesse de faire reculer la place de la voiture dans la ville, en installant dans les années 60 des plots pour éviter le parking, avec le plan Vélo de Jean Tibéri en 1996 ou depuis 2001 avec la municipalité Delanoë et une accélération des projets, souligne le chercheur. Depuis 2001, le trafic a baissé de 28% dans Paris. La capitale est dotée d’excellentes infrastructures de transports en commun et il y a peu de transit dans Paris. En 2013, lors de la fermeture des voies sur berge rive gauche, les automobilistes se sont adaptés en une semaine".

Pauline Ducamp