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Bientôt une prime à la casse plus généreuse

Le ministre de la Transition énergétique François de Rugy, descendant d'une voiture électrique début octobre à Paris.

Le ministre de la Transition énergétique François de Rugy, descendant d'une voiture électrique début octobre à Paris. - ERIC PIERMONT / AFP

En 2019, en plus de la prime à la conversion, les constructeurs pourraient offrir une prime supplémentaire pour l’achat d’un hybride. Les discussions se poursuivent entre les ministres de l’Economie et de la Transition écologique et les constructeurs pour une décision attendue fin novembre.

Le gouvernement veut enrichir le dispositif de la prime à la conversion, et il compte pour cela sur les constructeurs. Suite à une réunion ce lundi au ministère de l’Economie à Bercy, en présence du ministre de la Transition énergétique François de Rugy, et des patrons et représentants de Renault, PSA, Toyota, BMW, Ford, Kia, Mazda notamment, le gouvernement a avancé l’idée d’une "sur-prime" mise en place par les constructeurs, en plus de la prime à la conversion.

Rien n’a cependant été acté. Les discussions se poursuivront jusqu’à fin novembre, a expliqué Bruno Le Maire à l’issue de la réunion. "Nous allons demander aux constructeurs de faire des propositions concrètes et chiffrées dans le temps", a expliqué François de Rugy, ministre de la Transition écologique. Le calendrier des prochaines rencontres n'a pas encore été défini.

Une prime pour les voitures hybrides ?

L’idée d’un bonus pour les hybrides rechargeables semble pratiquement acquise. "Notre volonté est d’assurer la conversion du parc automobile français vers des véhicules qui sont moins émetteurs de CO2, en particulier des véhicules hybrides, hybrides rechargeables et électriques, a rappelé le ministre de l’Economie Bruno Le Maire. Sur le fond, les travaux doivent se poursuivre. Mais nous avons trouvé des constructeurs qui sont ouverts sur l’idée de renforcer la prime à la conversion, en ajoutant une prime supplémentaire qui serait versée par les constructeurs automobiles eux-mêmes, notamment pour les achats de véhicules électriques et hybrides rechargeables. Ce que nous souhaiterions avec François de Rugy [ministre de la Transition énergétique, ndlr], c’est que les véhicules faiblement émetteurs, même s’ils ne sont ni hybrides, ni électriques, puissent être inclus dans cet effort".

En sous-titre, le gouvernement veut que les constructeurs financent plus largement un dispositif qui a connu beaucoup de succès. Ces derniers veulent surtout contribuer sur les modèles qu’ils vont prochainement lancer."Il faut souligner la volonté de concertation du gouvernement, et une volonté sociale, souligne un patron de marque. Les constructeurs ont eux demandé de la visibilité, et du temps pour mettre en application les décisions". 

Un succès inattendu pour la prime à la conversion

Lancée en début d’année par l’ancien ministre de la Transition énergétique Nicolas Hulot, la prime à la conversion a dépassé les espérances et les prévisions budgétaires. Lors de sa présentation en septembre 2017, le gouvernement prévoyait en effet 100.000 primes distribuées chaque année, soit 500.000 sur tout le quinquennat. Or, ce chiffre des 500.000 devrait être atteint dès l’année prochaine. Utilisée à 70% par des ménages non-imposables, cette prime a été reconnue comme pragmatique par l’ensemble du secteur, car elle sert aussi à acheter des véhicules d’occasion. D’où son succès, auprès des plus modestes.

Mais ce succès a un prix. Rien que cette année, ce sont environ 425 millions d’euros qui sont nécessaires pour 250.000 primes minimum. Or, comme le rappelait le site spécialisé AutoActu en septembre, seuls 127 millions d’euros ont été provisionnés. La prime a pourtant été reconduite pour 2019. 41 millions d’euros seront pris sur les recettes du malus pour financer le dispositif. Mais le gouvernement veut sécuriser les financements. 70.000 personnes attendraient depuis plusieurs mois le versement de la prime, faute de budget disponible. Et la tension croissante, les menaces de manifestation autour des prix des carburants inquiète le gouvernement, qui veut ainsi faire un geste. Passer à une voiture plus récente permet d’économiser du carburant.

"La route rapporte à l’Etat entre 35 et 40 milliards d’euros par an. Les Français payent donc déjà énormément, résume Yves Carra, porte-parole de l’association Automobile Club. Le gouvernement n’a qu’à utiliser cette somme pour financer, par exemple la prime à la conversion, qui est un bon dispositif, adapté à ce que demande les Français".

"Face à l’augmentation des prix du pétrole, et aux coûts des carburants, la bonne politique est celle qui consiste à accélérer la transition du parc automobile français, et à permettre au plus grand nombre de ménages possibles d’avoir accès à des véhicules qui consomment moins d’essence, moins de diesel, pour combiner la protection de l’environnement, et le souci de préserver le pouvoir d’achat des Français", a affirmé Bruno Le Maire.

L’Etat cherche des fonds

Cela fait donc plusieurs semaines que l’Etat racle les fonds de tiroir pour savoir comment financer la prime à la conversion. L’idée de faire contribuer les constructeurs a été une première fois avancé lors du dîner donné à l’Elysée le 1er octobre, à la veille de l’ouverture du Mondial de l’Automobile. Les constructeurs se montrent prudents depuis.

D’un côté, les intérêts divergent entre les marques. PSA aimerait par exemple un soutien à l’hybride, dans lequel il se relance en 2019. Renault aimerait que ces modèles abordables, les Dacia, soient préservés d’une fiscalité trop rude, avec les diesel par exemple. De l'autre, les deux tiers du marché de l’occasion échappent aux constructeurs. Les ventes se font en effet de particulier à particulier.

Le nouveau dispositif semble cependant avoir mis tout le monde d’accord. Les constructeurs offraient de toute façon depuis plusieurs semaines des primes de reprise généreuses, avec ou sans éligibilité à la prime à la conversion. La France reste cependant moins généreuse que le voisin allemand. Et peut-être moins sévère avec ses constructeurs. En Allemagne, le groupe Volkswagen et les autres constructeurs allemands se sont largement vu imposer la mise en place de primes pour accompagner l’interdiction du diesel dans une quinzaine de grandes villes. Ces primes atteignent ainsi chez Audi ou Mercedes les 10.000 euros.

Pauline Ducamp