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80km/h: vers des limitations à la carte en fonction des routes?

Un panneau 80 "remplacé" lors d'une opération escargot organisé par des motards en Seine-Maritime en octobre 2018.

Un panneau 80 "remplacé" lors d'une opération escargot organisé par des motards en Seine-Maritime en octobre 2018. - BFMTV

Alors qu'Emmanuel Macron a évoqué un possible aménagement de l'abaissement de la limitation de la vitesse à 80km/h, l'idée de faire du cas par cas fait son chemin. Elle suscite toutefois l'opposition des défenseurs d'une mesure mise en place pour sauver des vies.

Faut-il faire marche arrière sur les 80km/h? Contestée depuis son annonce, début janvier 2018, et sa mise en place le 1er juillet dernier, la mesure pourrait être aménagée, a annoncé Emmanuel Macron le 15 janvier lors de l'ouverture du grand débat face aux maires de Normandie réunis à Grand Bourgtheroulde.

"Est-ce qu'on peut faire quelque chose qui soit mieux accepté et plus intelligent? Sans doute oui, en construisant davantage localement, par un dialogue qui doit se faire pendant ce débat", a notamment déclaré le président de la République.

Adapter la limitation à chaque route

L'idée d'un assouplissement de la mesure serait en cours de discussion au sein de l'exécutif: les préfets pourraient repasser la limitation à 90 km/h sur certaines routes et la laisser sur d’autres, jugées les plus dangereuses. Un changement important par rapport à la règle générale qui s'applique depuis le 1er juillet 2018: la limitation à 80km/h s’applique sans distinction sur toutes les routes à double sens sans séparateur central.

"Sur ce sujet, moi je le dis depuis le début (…), il faut faire confiance aux territoires et laisser les maires, qui ont les routes communales, les présidents de départements, qui ont les routes départementales, et les préfets pour les routes nationales, s'emparer du sujet pour faire du cas par cas, expliquait ce matin Benoît Simian, député LREM de Gironde et président du groupe "routes et sécurité routière" à l'Assemblée nationale dans la matinale de BFMTV.

Souvent citée comme l'un des déclencheurs du mouvement des gilets jaunes, cette mesure pose avant tout un problème de méthode pour le député de la majorité:

"On ne peut pas décider tout depuis Paris et ce genre de sujets doit se décider au plus près du terrain, il y a des zones accidentogènes qui méritent un bon 70, il y a des zones qui sont aujourd'hui à 80 et où le 90 est de rigueur. Il faut faire confiance aux territoires. Ce qu'aujourd'hui nous ne faisons pas car il y a un problème dans la méthode, il faut un vrai virage dans la méthode et c'est ce que le président de la République a annoncé dans le cadre de ce grand débat"

Une mesure de responsabilité que l'Etat doit assumer

Une logique de limitations de vitesse au cas par cas que rejette en bloc, Chantal Perrichon, présidente de la ligue contre la violence routière, également invitée de la matinale de BFMTV ce mercredi matin:

"C'est comme si on avait individualisé l'obligation du port de la ceinture, c'est comme si on avait décidé qu'on allait obliger les conducteurs à mettre la ceinture au Nord de la France et pas au Sud parce qu'il fallait vérifier ce qu'il en était de cette bonne mesure. Ou pour toutes les mesures en sécurité routière qui ont été prises depuis des années, je parle de 1972 et des premières limitations de vitesse, si on avait demandé aux départements ce qu'ils allaient vouloir, ce qu'ils allaient accepter. (...) Il y a un certain nombre de mesures de responsabilité que l'Etat doit assumer."

Bousculer le calendrier pour répondre à la colère?

Le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner était resté plutôt ferme dans une interview accordée à La Dépêche en début de semaine. Pour lui, pas question de repasser à une limitation à 90 km/h, du moins avant d'avoir consulté les conclusions de l'évaluation qui sera réalisée en juillet 2020, deux ans après la mise en place de la mesure.

Les dernières déclarations d'Emmanuel Macron, se disant ouvert à recevoir les propositions des élus à ce sujet, laisse pourtant envisager ces fameux "aménagements" dans un laps de temps plus court. Contactée, la sécurité routière ne fait pas de commentaire. Reste à savoir quel sera le premier bilan de cette mesure. S'il est particulièrement positif, il pourrait permettre au gouvernement de rester ferme sur cette question.

Malgré la forte hausse des dégradations de radars, qui pourrait avoir entraînée une recrudescence des excès de vitesse et donc de la mortalité ces derniers mois, la publication du bilan de la sécurité routière pour l'année 2018 est attendu pour fin janvier.

Julien Bonnet