Un collectif contre l'interdiction des vitres teintées passe à l'action
Si vous avez équipé les vitres avant de votre véhicule d'un filtre teinté ou d'un film sécuritaire "anti-carjacking", sachez que vous pourriez vous retrouver dans l'illégalité au 1er janvier prochain, risquant ainsi une amende de 135 euros et un retrait de trois points du permis de conduire.
Le think-tank sur l'automobile, Auto, Mobilité & Avenir ainsi que l'Association des Professionnels du Film pour Vitrage ont décidé de faire la guerre à cette mesure qu'ils contestent. Ils remettent en cause le seuil fixé (70 % de la lumière ne devra pas être filtrée) qu'ils jugent arbitraire, la difficulté de juger de l'opacité des vitres pour les forces de l'ordre, dépourvues d'outils de mesure, et les délais courts de mise en place de l'interdiction.
Une mesure à l'oeil nu?
Concrètement, il est vrai que se représenter en quoi consiste un verre laissant passer au moins 30% de la lumière est difficile. C'est tout l'objet d'une des critiques les plus vives émises contre cette réforme: faire la différence entre une vitre teintée légale et l'autre illégale est impossible. C'est en tout cas l'avis des professionnels du secteur qui ont donné rendez-vous, avec Auto, Mobilité & Avenir, dans un centre de pose de filtres pour vitrages du 16ème arrondissement de Paris, pour un cas pratique.
A première vue, rien ne différencie les deux vitres avant de ce véhicule, les deux ne sont pas opaques, offrent la même visibilité et ne devraient, en théorie, pas poser de problème. Pourtant, la démonstration faite par Benoît Lombard, directeur de la société Leaderfilm qui distribue des films teintés et anti-carjacking, permet de mettre en lumière quelques-uns des points de discorde autour de la mesure qui entrera en vigueur en 2017.
Pour cela, le professionnel de la distribution fait appel à un appareil professionnel, le Photomètre. Un appareil importé des Etats-Unis, aux normes européennes, mais "pas homologué pour des contrôles par les forces de l'ordre", d'après Benoit Lombard. Une fois la vitre calée dans la fente du dispositif, le rayon de lumière qui la traverse est analysé par l'appareil qui donne le pourcentage de lumière qui n'a pas été filtré.
La première vitre avant analysée, celle de droite, est équipée d'un film teinté et laisse passer 73% de la lumière. Il est donc légal aux yeux de la la réglementation qui sera appliqué. Rien ne le différenciant de la vitre de gauche, on peut s'attendre à un résultat similaire.
Pourtant, de l'autre côté, le carreau ne laisse passer que 40 % de la lumière et sera donc jugé illégal. Pourtant la visibilité à l'intérieur est la même. Il apparaît donc bien difficile de juger à l'oeil la teinte éventuellement trop opaque d'une vitre. Le seuil défini dans la loi ne semble donc pas en adéquation avec le besoin (légitime) de pouvoir identifier un conducteur, du moins d'après la démonstration qui nous a été faite. Et la situation est encore plus compliquée lorsque l'on ajoute un filtre sécuritaire, communément appelé "anti-carjacking", pourtant transparent.
Le carreau de droite, au filtrage légal, devient trop opaque selon le seul fixé par la future réglementation puisqu'il ne laisse passer que 64% de la lumière. Pourtant, aussi bien à l'extérieur qu'à l'intérieur, la visibilité ne semble pas impactée.
Un recours devant le Conseil d'Etat
Les professionnels du secteur ont donc décider de mandater un avocat, Maître Rémy Josseaume, spécialisé dans l'automobile, pour porter un recours devant le conseil d'Etat. Car en dehors de la norme trop restrictive choisie par les autorités, cette réforme menace fortement le secteur et les automobilistes. Elle va concerner entre 2 et 5 millions de véhicules, et la remise aux normes aura un coup pour les usagers qui devront payer pour faire retirer les films teintés de leur véhicule.
Autre point souligné: le décret rend responsable le conducteur du véhicule, alors que seul le propriétaire doit être jugé responsable de l'équipement de ce dernier, ce qui pose un problème évident pour les voitures de location. Qu'en sera-t-il aussi, des automobilistes venant d'Irlande, des Pays-Bas ou encore de Slovaquie, où là réglementation est beaucoup moins restrictive?
Des forces de l'ordre pas équipées, des automobilistes non-plus