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Quand les technologies font elles aussi baisser la mortalité routière

Au-delà des mesures prises par le gouvernement pour améliorer la sécurité routière, ce sont aussi les technologies et les progrès réalisés dans la conception des véhicules qui permettent de réduire le nombre des morts sur la route.

Vitesse abaissée à 80 km/h, déploiement des éthylotests anti-démarrage, renforcement des sanctions sur l'usage du téléphone au volant... ce sont les principales mesures annoncées récemment par le gouvernement pour diminuer le nombre de morts sur les routes de France. La volonté est en effet de reprendre l'initiative dans le domaine de la sécurité routière, 15 ans après l'implantation des premiers radars de vitesse en 2003.

Ces derniers sont souvent présentés comme la principale explication à la forte baisse de la fréquence des accidents mortels. Mais la progression des technologies développées par les constructeurs automobiles, et une exigence accrue en termes de normes de sécurité, ont aussi joué un rôle non négligeable sur la baisse du nombre de tués sur les routes.

L'ABS et l'ESP aussi efficaces que les radars?

De 7643 tués encore en l'an 2000 à moins de 4000 à partir de 2010, la baisse ralentit en effet ces dernières années, avec deux hausses consécutives du nombre de morts sur les routes françaises en 2016 et 2017. Le record de 3268 morts atteint en 2013 n'a pas depuis été amélioré. De quoi rendre d'autant moins probable de passer sous la barre des 2000 morts en 2020, l'objectif fixé par Manuel Valls en 2012, et poursuivi depuis par les gouvernements successifs.

Sur la même période, les constructeurs automobiles ont aussi oeuvré pour réduire ce triste bilan. Si, bien entendu, certaines technologies de sécurité restent au départ d'onéreuses options, l'évolution de la sécurité à bord passe souvent par des normes plus sévères, pour justement généraliser ces innovations technologiques.

En 2004, soit un an après l'installation des premiers radars automatiques en France, l'Europe imposait par exemple la présence d'un système empêchant le blocage des roues au freinage (le fameux ABS). Dix ans plus tard, c'est l'ESP (pour "Electronic Stability Program") qui devient obligatoire sur les véhicules neufs. Or, en 2014, il est déjà présent sur 84% des véhicules neufs vendus en Europe. Certes, les constructeurs ont anticipé cette obligation législative, mais la baisse progressive du coût de cette fonction a aussi permis de la généraliser. Et de prouver son efficacité. Assurer la stabilité du véhicule et l'empêcher de déraper dans les virages permettrait en effet d'éviter 80% des accidents d'après des études indépendantes, écrit en 2014 Le Figaro

Ces technologies ont donc elles aussi permis de réduire le nombre d'accidents, leur gravité et donc le nombre de morts sur la route. En 2002, on dénombrait ainsi en France 100.540 accidents et 7242 tués, soit un taux de mortalité (le nombre de tués pour 100 accidents corporels) de 6,87. En prenant le bilan provisoire de 2017 (sur un an de décembre 2016 à novembre 2017, on constate une division quasiment par deux du nombre d'accidents (58.984) et encore plus du nombre de tués (3504), soit un taux de mortalité descendu à 5,94.

Une course à la voiture la plus sûre

L'organisme indépendant Euro NCAP, qui réalise les crash tests et évalue le niveau de sécurité des nouveaux véhicules commercialisés en Europe, fêtait l'an dernier ses 20 ans. Elle estimait alors que son action avait permis de sauver 78.000 vies entre 1998 et 2015. Cela vaut le coup de torturer plus de 1800 voitures (et même des supercars) avec les célèbres mannequins embarqués à l'intérieur! Un exercice que les marques automobiles n'ont pas forcément toujours apprécié.

Ainsi, à la fin des années 90, les constructeurs généralistes n'avaient pas spécialement goûté de voir leurs modèles phares être épinglés lors des premiers crash-tests menés par l'organisme européen. Les best-sellers de l'époque (comme les Fiat Punto, Nissan Micra, Opel Corsa et Renault Clio) n'avaient pas vraiment brillé lors de ces essais. Mais depuis, cet exercice s'est largement imposé et contribue clairement à une compétition vertueuse pour savoir qui proposera le véhicule le plus sûr.

Avec l'évolution des critères, les constructeurs sont ainsi incités à renouveler régulièrement leurs modèles, comme à enrichir leurs technologies de sécurité. La Fiat Punto, commercialisée depuis 2005 (soit une petite éternité dans le contexte automobile actuel), est ainsi devenue l'an dernier la première voiture à écoper d'un zéro pointé.

La petite Italienne n'a pourtant pas obtenu des scores ridicules dans trois des principaux critères (protection des adultes, des enfants et des piétons), mais n'a pas apprécié l'arrivée d'un quatrième point de vérification: les "aides à la sécurité". Or, leur quasi-absence se traduit forcément par la note minimale, zéro. A l'inverse, la Toyota Yaris, restylée l'an dernier, est un des rares modèles à avoir conservé sa note maximale de 5 étoiles, quand ses concurrentes en perdaient au moins 2.

Des technos et des tests pour aller plus loin

L'Euro NCAP a donc su évoluer en intégrant toujours plus de technologies, et compte bien continuer à évoluer dans ce sens. En 2018, l'institut débutera par exemple les tests des systèmes permettant la reconnaissance et l'évitement des cyclistes, en vue d'une prochaine prise en compte dans ses critères d'évaluation. Une feuille de route ambitieuse a ainsi été présentée pour la période 2020-2025. Elle prévoit d'ajouter différentes aides à la conduite (freinage d'urgence et aide à l'évitement notamment) et les systèmes de communication entre véhicules comme condition nécessaire pour décrocher à l'avenir la note maximale.

L'arrivée des premiers véhicules autonomes offre aussi de belles perspectives. Lors de la présentation de son démonstrateur de véhicule 100% autonome (sans volant ni pédale), l'américain General Motors évoquait ainsi le chiffre édifiant: 94% des accidents sont d'origine humaine. Une manière de faire fantasmer sur un futur où, certes on ne conduira plus, mais où le risque de mourir en voiture sera considérablement réduit.

Des progrès qui n'ont pas échappé au Premier ministre français:

"Dans les années qui viennent, le développement progressif, rapide selon certains, du véhicule autonome apportera peut-être de nouvelles solutions. Tous les acteurs français du secteur automobile y travaillent activement mais d'ici là, il est de notre devoir de nous mobiliser en faveur de la sécurité routière et d'adapter en conséquence nos comportements", avait souligné Edouard Philippe, lors de son discours d'annonce des dernières mesures de sécurité routière.

Julien Bonnet