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Voitures du futur

Quand les ingénieurs de Ford somnolent au volant des prototypes de voitures autonomes

Des prototypes de Ford Fusion autonomes en plein test, gare à la sieste !

Des prototypes de Ford Fusion autonomes en plein test, gare à la sieste ! - 01Net

Une anecdote qui pose la question de l'intérêt des véhicules semi-autonomes, où le conducteur pourrait relâcher "temporairement" son attention sur la conduite.

Quand des anecdotes sur des tests de prototypes peuvent avoir une réelle influence sur une stratégie commerciale. Le constructeur américain Ford mène depuis de nombreuses années des recherches sur le véhicule autonome et dispose même d'un important terrain d'entraînement près de son siège de Détroit (Michigan). Une ville, MCity, avec des rues façon décor de cinéma lui permet de tester différentes situations que rencontreront ses futures voitures plus ou moins autonomes. 

Impossible de maintenir les ingénieurs éveillés

Et comme la technologie se perfectionne de plus, les ingénieurs placés derrière le volant ont pris une mauvaise habitude: s'assoupir au volant, au lieu de surveiller les écrans pendant chaque trajet. Ford a bien essayé de les maintenir éveillé par tous les moyens: sonneries, alarmes lumineuses, siège ou volant vibrant mais rien n'y fait, précise un article de Bloomberg.

Un deuxième ingénieur a même été placé dans les véhicules en test, mais là encore le trajet simulé était si paisible que les testeurs avaient toujours du mal à rester en situation de concentration optimale, a souligné Raj Nair, le chef du développement produit chez Ford. 

"Ce sont des ingénieurs entraînés qui sont là pour observer ce qui se passe, a ajouté le dirigeant de Ford. Mais c'est la nature humaine, si vous vous sentez de plus en plus en confiance dans le véhicule, vous avez de moins en moins besoin d'y prêter attention". 

Des voitures sans volant, ni pédale

Cette expérience a en tout cas permis à Ford de se rendre compte qu'il pouvait être potentiellement dangereux de proposer des véhicules équipés d'une fonction de conduite semi-autonome. Si des ingénieurs surentraînés s'endorment, qu'en sera-t-il de conducteurs lambda, concentrés sur leur smartphone? La marque voudrait ainsi proposer dès 2021 des véhicules 100% autonomes. Avec un choix radical dans ces modèles qui serait de ne plus proposer ni volant ni pédale, comme sur le prototype bien connu de Google. 

Il existe en effet plusieurs niveaux d'autonomie, de 0 (où l'humain gère totalement la conduite) à 5 (où c'est un système informatique qui gère totalement la conduite). Entre ces deux extrêmes, les deux premiers niveaux correspondent davantage à ce qu'on appelle aujourd'hui les assistants de conduite (qui peuvent gérer en partie certains aspects de la conduite en laissant le conducteur seul maître à bord). Mais le niveau 3 constitue un entre-deux: une fois activé, le conducteur pourrait se consacrer à d'autres tâches, mais pourrait être appelé à reprendre les commandes à tout moment.

2 minutes pour reprendre le volant

Les marques allemandes comme BMW, Mercedes-Benz et Audi proposeraient ainsi dès l'an prochain une autonomie de niveau 3, avec un laps de temps de 10 secondes laissés au conducteur pour reprendre le contrôle en cas de besoin. Nissan et Honda laisseraient de leur côté 30 secondes, un temps que certains experts estiment suffisant pour reprendre ses esprits, même après une sieste au volant. 

D'autres toutefois, comme le patron de Volvo Hakan Samuelsson cité par Bloomberg, estiment qu'il faut au moins 2 minutes à un être humain pour passer d'une tâche comme l'envoi de mails à une reprise totale de ses moyens pour conduire en toute sécurité.

"Cela devrait être l'un ou l'autre, estime le dirigeant, en termes de responsabilité, vous ne pouvez pas dire à quelqu'un vous êtes un peu responsable. Vous êtes soit responsable, soit pas responsable du tout". 

Des questions passionnantes qui se posent avec la diffusion de ces technologies et l'évolution de la réglementation. Il est en effet pour le moment toujours interdit de lâcher le volant des mains, même sur des véhicules disposant d'un système de conduite autonome poussé comme sur les Tesla.

Julien Bonnet